

En examinant le texte de Luc, nous avons l’impression que Joseph, Marie et Jésus retournent rapidement à Nazareth après la naissance de Jésus. Luc n’a pas jugé nécessaire de mentionner le séjour en Égypte décrit par Matthieu, probablement pour éviter de surcharger son récit. Il est important de noter que les deux évangélistes avaient des objectifs différents, choisissant de relater des faits qui servaient leurs intentions propres sans se perdre dans des détails qui pourraient brouiller la compréhension.
Matthieu nous offre ainsi un complément d’information qui éclaire d’une lumière différente les événements. Nous pourrions envisager que le retour de la famille à Nazareth a lieu après les turbulences politiques liées à la succession d’Hérode et aux décisions de Rome, probablement après la période des fortes chaleurs estivales, vers octobre de l’an -1. Nous supposons donc leur arrivée à Nazareth en novembre de la même année, après un mois de voyage, ce qui porte la durée totale du déplacement à environ 14 mois.
Les textes laissent transparaître des impressions distinctes : un retour rapide à Nazareth selon Luc, et une découverte de cette ville selon Matthieu. Une lecture superficielle pourrait suggérer des contradictions, suscitant des doutes sur la véracité des événements.
Toutefois, la raison pour laquelle Luc, dans son évangile, omet le séjour en Égypte semble manifestement simple : il choisit de passer directement au retour à Nazareth, où la famille résidait auparavant, car le détail du séjour en Égypte n’apporte rien de plus à sa présentation. Il s’adresse à des non-Juifs !
Matthieu, quant à lui, met en avant la prophétie d’Osée (11.1) : « j’ai appelé mon fils hors d’Égypte », comme preuve supplémentaire de la messianité de Jésus pour convaincre un public juif, et il l’intègre donc à son récit.
Chaque évangéliste avait sa propre stratégie de narration, visant à convaincre des publics spécifiques : Matthieu s’adressait aux Juifs, tandis que Luc s’adressait aux Grecs et aux non-Juifs.
Comment un non-Juif pourrait-il saisir les références aux Prophètes dont il n’a jamais entendu parler ? Les évangélistes étaient également limités par les contraintes techniques de publication de leur époque, comme la taille des papyrus disponibles.
Il est essentiel de ne pas voir chaque Évangile comme un compte rendu exhaustif, mais plutôt comme une partie d’un tout. Ainsi, c’est en réunissant Matthieu, Marc, Luc et Jean que l’on obtient une vision complète de cette extraordinaire histoire.