Chapitre
Chapitre 01
Les Evangiles

Introduction

La vie du Messie JĂ©sus, n’a pas marquĂ© l’histoire profane. Cette absence ne devrait pas surprendre, Ă©tant donnĂ© que l’attention historique se concentrait principalement sur les figures dominantes de l’Ă©poque, tels les rois et les empereurs.

Pourquoi, alors, porterait-on intĂ©rĂȘt Ă  un homme issu d’une modeste famille de charpentiers, originaire d’un village obscur de GalilĂ©e, une province peu influente dans un pays mineur ?

Qui aurait pu prédire que cet enfant bouleverserait le monde entier ?

Jean 1.46 (S21)

46 Nathanaël demanda : « Peut-il sortir quelque chose de bon de Nazareth ? » Philippe lui répondit : « Viens et vois. »

(Traduction Louis Segond S21)

Nazareth, un village mĂ©connu de GalilĂ©e, n’Ă©veillait Ă  l’Ă©poque l’intĂ©rĂȘt de personne, mĂȘme parmi les Juifs, pour qui l’idĂ©e qu’une personnalitĂ© notable puisse en ĂȘtre issue paraissait inconcevable.

La renommĂ©e de JĂ©sus n’a franchi les frontiĂšres d’IsraĂ«l qu’aprĂšs sa mort, un Ă©vĂ©nement que l’histoire mondiale n’a pas su anticiper, laissant peu de traces mĂ©morielles de son existence.

C’est grĂące aux tĂ©moignages de ses disciples que nous disposons d’informations Ă  son sujet.

La conclusion est donc la suivante : les Évangiles constituent notre principale source d’informations sur JĂ©sus. Nous disposons de quatre rĂ©cits dĂ©taillant sa vie. Nous Ă©tudierons ces textes, leur contexte historique, leur origine et leurs auteurs, ainsi que les motivations qui ont poussĂ© ces derniers Ă  les rĂ©diger.

Il existe Ă©galement quelques rĂ©fĂ©rences historiques contemporaines attestant de l’existence de JĂ©sus dans le contexte politique de l’Ă©poque. D’autres Ă©crits, considĂ©rĂ©s comme apocryphes, mentionnent Ă©galement JĂ©sus, mais leurs rĂ©cits, souvent fantastiques et invĂ©rifiables, sont gĂ©nĂ©ralement mis de cĂŽtĂ©. Ainsi, notre source principale demeure les Évangiles.

La bonne nouvelle

Pour plus d’informations :

‱ Lire l’annexe ANN008 : L’Évangile de Matthieu

‱ Lire l’annexe ANN015 : L’Évangile de Marc 

‱ Lire l’annexe ANN001 : L’Évangile de Luc 

‱ Lire l’annexe ANN002 : L’Évangile de Jean

C’est au cours du second siĂšcle que le terme grec, traduit en français par « Évangile », a commencĂ© Ă  ĂȘtre employĂ©. « Évangile » signifie « bonne nouvelle », une expression dĂ©signant la rĂ©vĂ©lation du salut offert par la mort de JĂ©sus, le Messie. Cette rĂ©demption, symbolisĂ©e par le sacrifice des agneaux au temple pour expier temporairement les pĂ©chĂ©s, devient dĂ©finitive avec le sacrifice de JĂ©sus.

Pour ĂȘtre sauvĂ©, il suffit donc de croire et d’accepter cette rĂ©demption exceptionnelle – voilĂ  la « bonne nouvelle ». Par extension, l’ensemble du rĂ©cit de la vie de JĂ©sus est qualifiĂ© d’Évangile. Il peut sembler surprenant qu’il existe quatre textes distincts relatant cette nouvelle. Un seul aurait pu paraĂźtre suffisant et aurait Ă©vitĂ© de nombreux dĂ©bats sur les divergences apparentes.

Ces quatre textes sont en rĂ©alitĂ© complĂ©mentaires, chacun rĂ©vĂ©lant une facette diffĂ©rente de JĂ©sus. Ils s’adressent aussi Ă  diffĂ©rents publics : d’abord aux Juifs, puis aux Grecs, aux Romains et enfin Ă  tous les non-Juifs. Les trois premiers, Matthieu, Marc et Luc, sont dits « synoptiques » car ils peuvent ĂȘtre lus en parallĂšle, prĂ©sentant de nombreux points communs.

Le livre de Matthieu comprend 1071 versets, Marc 680 et Luc 1151. Matthieu et Marc partagent 600 versets, Matthieu et Luc 320, tandis que Marc et Luc en ont 350 en commun. Le quatriÚme évangile, celui de Jean, avec ses 879 versets, se distingue nettement des trois premiers et complÚte les synoptiques en apportant une perspective nouvelle.

C’est grĂące Ă  l’Évangile de Jean que l’on dĂ©duit que le ministĂšre de JĂ©sus a durĂ© 3,5 ans, puisqu’il mentionne sa participation Ă  au moins trois PĂąques diffĂ©rentes. La lecture exclusive des Ă©vangiles synoptiques pourrait suggĂ©rer un ministĂšre d’une seule annĂ©e, mais certains dĂ©tails relatifs Ă  l’avancement des saisons dans ces textes corroborent les indications de Jean.

Ces quatre Ă©vangiles doivent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme une unitĂ© composĂ©e de quatre parties complĂ©mentaires. Ainsi, il ne faut pas interprĂ©ter l’absence d’un rĂ©cit, comme celui de la naissance de JĂ©sus chez Marc et Jean, comme une ignorance ou une contestation de ce fait. Leur silence sur certains aspects ne remet pas en cause leur crĂ©dibilitĂ© ; ils ont simplement choisi de ne pas rĂ©pĂ©ter des informations dĂ©jĂ  abordĂ©es.

Nous n’avons pas quatre rĂ©cits exhaustifs et indĂ©pendants, mais un ensemble harmonieux et cohĂ©rent. La singularitĂ© de certains Ă©vĂ©nements rapportĂ©s exclusivement par un seul auteur n’indique donc pas une anomalie. Ces textes forment un tout complĂ©mentaire, comme nous le verrons plus loin dans une proposition de rĂ©daction collective et concertĂ©e des rĂ©cits de Matthieu et Marc, dĂ©butant peu aprĂšs la PentecĂŽte de l’an 33.

Le but des écrivains

Pour plus d’informations :
‱ Lire l’annexe ANN049 : Les objectifs des Apîtres
‱ Lire l’annexe ANN046 : Les exigences technique d’édition au 1er siĂšcle

Il est essentiel de comprendre les motivations qui ont incitĂ© ces auteurs Ă  rĂ©diger les Évangiles et, par consĂ©quent, d’analyser leurs intentions et objectifs. Pourquoi existe-t-il quatre Ă©vangiles ? Bien que nous ne souhaitions pas nous attarder excessivement sur les dĂ©tails, il est nĂ©cessaire d’aborder ces diffĂ©rents aspects.

Lors de l’analyse d’un document, il est crucial de connaĂźtre sa nature. Une fable, un roman, ou un rapport n’apporteront pas le mĂȘme type d’informations. Les raisons de sa rĂ©daction et la perspective de l’auteur sont des Ă©lĂ©ments clĂ©s pour en tirer des conclusions pertinentes. Par exemple, en lisant un roman, nous ne devons pas nous attendre Ă  y trouver des vĂ©ritĂ©s factuelles. La position de l’auteur vis-Ă -vis des Ă©vĂ©nements qu’il dĂ©crit influencera sa narration. Cela ne signifie pas qu’il s’Ă©carte de la vĂ©ritĂ©, mais qu’il mettra l’accent sur certains faits pour appuyer son point de vue.

L’objectif des quatre Évangiles n’est pas tant de narrer la biographie de JĂ©sus que d’encourager la croyance en lui.

Jean 20.30–31 (S21)

30 JĂ©sus a accompli encore, en prĂ©sence de ses disciples, beaucoup d’autres signes qui ne sont pas dĂ©crits dans ce livre.
31 Mais ceux-ci ont Ă©tĂ© dĂ©crits afin que vous croyiez que JĂ©sus est le Messie, le Fils de Dieu, et qu’en croyant vous ayez la vie en son nom.

(Traduction Louis Segond S21)

Luc 1.1–4 (S21)

Plusieurs ont entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous,
2 d’aprĂšs ce que nous ont transmis ceux qui ont Ă©tĂ© des tĂ©moins oculaires dĂšs le commencement et qui sont devenus des serviteurs de la parole.
3 Il m’a donc paru bon Ă  moi aussi, qui me suis soigneusement informĂ© sur toutes ces choses dĂšs l’origine, de te les exposer par Ă©crit d’une maniĂšre suivie, excellent ThĂ©ophile,
4 afin que tu reconnaisses la certitude des enseignements que tu as reçus.

(Traduction Louis Segond S21)

Ainsi, le principal souci des auteurs des quatre Ă©vangiles est de rapporter des Ă©vĂ©nements dans le but de renforcer la croyance en JĂ©sus comme le fils de Dieu, venu pour la rĂ©demption de l’humanitĂ©.

Ces rĂ©cits ne sont pas des biographies au sens traditionnel. Ils ne suivent pas toujours un ordre chronologique, et il peut y avoir des imprĂ©cisions dans le dĂ©roulement des faits. Des expressions telles que « ensuite », « aprĂšs », ou « le lendemain » peuvent prĂȘter Ă  confusion.

L’usage frĂ©quent du mot « aussitĂŽt » par Marc, par exemple, mĂ©rite une explication, car il ne correspond pas toujours Ă  une immĂ©diatetĂ© littĂ©rale. L’accent est mis sur le message et les actes qui le confirment, plutĂŽt que sur les dĂ©tails biographiques.

Mis Ă  part un Ă©vĂ©nement lorsqu’il avait 12 ans, nous n’avons pas de dĂ©tails sur la jeunesse de JĂ©sus. Les liens avec l’histoire profane sont rares. En conclusion, ces textes ne sont pas des biographies au sens contemporain du terme. Il est donc nĂ©cessaire, Ă  travers ces tĂ©moignages, de dĂ©couvrir les donnĂ©es historiques pour retracer l’histoire de JĂ©sus, l’homme le plus cĂ©lĂšbre du monde.

Le choix de ces hommes

Jean 20.30.(S21)

30 JĂ©sus a accompli encore, en prĂ©sence de ses disciples, beaucoup d’autres signes qui ne sont pas dĂ©crits dans ce livre.

(Traduction Louis Segond S21)

Ce verset nous aide Ă  comprendre que les auteurs des quatre Évangiles ont dĂ» faire des choix Ă©ditoriaux. Durant les 3,5 annĂ©es de son ministĂšre, de l’an 29 Ă  33, le Messie JĂ©sus a rĂ©alisĂ© de nombreux miracles, attirant une foule en quĂȘte de guĂ©rison et de dĂ©livrance.

En lisant ces textes, nous constatons des rĂ©cits similaires mais parfois divergents, ce qui pourrait ĂȘtre interprĂ©tĂ© Ă  tort comme des contradictions. Une explication plausible est que les Ă©vangĂ©listes ne dĂ©crivent pas toujours le mĂȘme Ă©vĂ©nement. ConsidĂ©rons la multitude de guĂ©risons et de miracles : JĂ©sus, s’adressant Ă  diffĂ©rents auditoires, a pu rĂ©pĂ©ter ses enseignements dans des circonstances variĂ©es, probablement avec des formulations diffĂ©rentes. Ainsi, lorsque Luc mentionne un Ă©vĂ©nement, cela peut ne pas ĂȘtre exactement le mĂȘme que celui rapportĂ© par Matthieu ou Marc.

Nous ne devrions pas ĂȘtre perturbĂ©s par des critiques soulignant des incohĂ©rences entre deux rĂ©cits qui, en rĂ©alitĂ©, peuvent dĂ©crire des situations distinctes. Il est tout Ă  fait possible que JĂ©sus ait Ă©tĂ© oint de parfum par des femmes Ă  plusieurs reprises, qu’il ait renversĂ© les tables des marchands du temple plus d’une fois, ou qu’il ait rĂ©alisĂ© plusieurs pĂȘches miraculeuses. Les BĂ©atitudes, par exemple, ont-elles Ă©tĂ© proclamĂ©es une seule fois, ou les textes regroupent-ils diffĂ©rents enseignements pour en faciliter la comprĂ©hension ?

Choisir certains Ă©vĂ©nements plutĂŽt que d’autres n’a pas dĂ» ĂȘtre une tĂąche aisĂ©e pour les Ă©vangĂ©listes. Il se peut mĂȘme que certains rĂ©cits soient des synthĂšses de plusieurs faits distincts.

Jean 21.25 (S21)

25 JĂ©sus a fait encore beaucoup d’autres choses. Si on les Ă©crivait en dĂ©tail, je ne pense pas que le monde entier pourrait contenir les livres qu’on Ă©crirait.

(Traduction Louis Segond S21)

Les 40 miracles rapportĂ©s dans les quatre Évangiles ne reprĂ©sentent qu’une fraction des actes de JĂ©sus, mais ils suffisent Ă  inciter le lecteur Ă  la croyance. Il n’y a donc pas de contradictions ou de divergences fondamentales entre les rĂ©cits, mais plutĂŽt un choix Ă©ditorial propre Ă  chaque Ă©vangĂ©liste.

La mĂȘme scĂšne, racontĂ©e par deux personnes diffĂ©rentes, peut sembler varier simplement parce que chacun met l’accent sur des aspects diffĂ©rents. Nous avons donc des complĂ©ments d’information plutĂŽt que des contradictions.

Un autre choix crucial a été de transcrire par écrit toute la tradition orale.

Le passage à une version écrite de leur témoignage

L’analyse de la vie des ApĂŽtres nous Ă©claire sur leur transition vers une documentation Ă©crite de leurs tĂ©moignages. Il est crucial de reconnaĂźtre que ces individus Ă©taient familiers avec l’Ă©criture, issus d’une culture profondĂ©ment enracinĂ©e dans les textes sacrĂ©s, tels que la Torah. Les scribes jouaient un rĂŽle majeur dans cette sociĂ©tĂ©. Les manuscrits de la Mer Morte, dĂ©couverts Ă  QumrĂąn en 1947, tĂ©moignent de l’importance de l’Ă©criture dans la transmission du savoir, malgrĂ© la persistance de la tradition orale.

Avant de dĂ©velopper notre hypothĂšse, rappelons quelques faits essentiels. À ce jour, aucun papyrus original n’a Ă©tĂ© identifiĂ© permettant de dater de façon objective et dĂ©finitive la composition des Évangiles. Le fragment de papyrus le plus ancien que nous possĂ©dons, mesurant 6 x 9 cm et contenant cinq versets du chapitre 18 de l’Évangile selon Jean, date de la premiĂšre moitiĂ© du 2Ăšme siĂšcle et a Ă©tĂ© dĂ©couvert en Égypte.

Nous disposons actuellement d’un grand nombre de copies plus ou moins complĂštes des Évangiles, dont les plus anciennes remontent au milieu du 2Ăšme siĂšcle. À ce jour, environ 5 000 manuscrits en grec et plus de 24 000 dans diverses langues ont Ă©tĂ© recensĂ©s.

Concernant les langues utilisĂ©es pour ces premiĂšres rĂ©dactions, bien que nous n’ayons pas de certitudes absolues, nous pouvons en faire des dĂ©ductions raisonnables.

Des chercheurs, historiens, religieux et athĂ©es ont tentĂ© d’Ă©tablir des dates de rĂ©daction pour ces textes. Leurs travaux, bien qu’argumentĂ©s, conduisent Ă  des conclusions variĂ©es. Certains situent la rĂ©daction des Évangiles dans les annĂ©es 50 ou 60, d’autres dans les annĂ©es 70, voire plus tard.

L’hypothĂšse que nous allons prĂ©senter repose sur le pragmatisme des ApĂŽtres et le contexte historique de l’Ă©poque.

Les 12 témoins

Des Liens Familiaux
L’analyse des liens familiaux parmi les premiers disciples de JĂ©sus est essentielle pour comprendre leur dynamique de groupe. Notons notamment :

Jésus et Jean le Baptiste étaient cousins.
André et Pierre étaient frÚres.
Jacques et Jean, fils de Zébédée et Salomé, étaient également frÚres.

Un Groupe d’Amis

La majoritĂ© des douze tĂ©moins Ă©taient originaires ou avaient des liens avec la GalilĂ©e, Ă  l’exception notable de Judas l’Iscariot, originaire de JudĂ©e. La plupart Ă©taient des pĂȘcheurs sur le lac de TibĂ©riade et avaient dĂ©jĂ  des liens avant de suivre Jean le Baptiste. Pour plus de dĂ©tails, voir l’annexe ANN047 : « L’origine des ApĂŽtres ».

Un passage clĂ© se trouve dans Marc 1.29-31, dĂ©crivant une guĂ©rison dans la maison de Simon et AndrĂ© Ă  CapernaĂŒm en GalilĂ©e. Ce passage illustre l’ancrage profond de ces hommes dans leur rĂ©gion natale.

Marc 1.29–31 (S21)

29 En sortant de la synagogue, ils se rendirent avec Jacques et Jean Ă  la maison de Simon et d’AndrĂ©.
30 La belle-mĂšre de Simon Ă©tait couchĂ©e avec de la fiĂšvre ; aussitĂŽt on parla d’elle Ă  JĂ©sus.
31 Il s’approcha, la fit lever en lui prenant la main, et [à l’instant] la fiùvre la quitta. Puis elle se mit à les servir.

(Traduction Louis Segond S21)

Un Groupe de Disciples

Ces hommes, dĂ©jĂ  liĂ©s par leurs origines, leurs professions et leurs quĂȘtes spirituelles, ont Ă©tĂ© profondĂ©ment influencĂ©s par Jean le Baptiste. Croyant initialement en lui comme le Messie, ils ont suivi ses enseignements et se sont fait baptiser. Jean 1.29-34 dĂ©crit comment Jean le Baptiste a reconnu JĂ©sus comme le Messie.

En Jean 1.41–42, nous voyons comment ces hommes ont partagĂ© la nouvelle de la dĂ©couverte du Messie entre eux, renforçant ainsi leur cohĂ©sion en tant que groupe.

Jean 1.29–34 (S21)

29 Le lendemain, il vit JĂ©sus s’approcher de lui et dit : « Voici l’Agneau de Dieu qui enlĂšve le pĂ©chĂ© du monde.
30 C’est celui Ă  propos duquel j’ai dit : ‘AprĂšs moi vient un homme qui m’a prĂ©cĂ©dĂ©, car il existait avant moi.’
31 Pour ma part, je ne le connaissais pas, mais c’est afin de le faire connaĂźtre Ă  IsraĂ«l que je suis venu baptiser d’eau. »
32 Jean rendit aussi ce tĂ©moignage : « J’ai vu l’Esprit descendre du ciel comme une colombe et s’arrĂȘter sur lui.
33 Je ne le connaissais pas, mais celui qui m’a envoyĂ© baptiser d’eau m’a dit : ‘Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et s’arrĂȘter, c’est lui qui baptise du Saint-Esprit.’
34 Et moi, j’ai vu et j’atteste qu’il est le Fils de Dieu. »

(Traduction Louis Segond S21)

Jean 1.41–42 (S21)

41 Il rencontra d’abord son frĂšre Simon et lui dit : « Nous avons trouvĂ© le Messie », ce qui correspond Ă  Christ.
42Il le conduisit vers Jésus. Jésus le regarda et dit : « Tu es Simon, fils de Jonas, tu seras appelé Céphas », ce qui signifie Pierre.

(Traduction Louis Segond S21)

Un Groupe d’Apîtres

Leur vie a changĂ© radicalement lorsqu’ils ont choisi de suivre JĂ©sus. Matthieu 4.18-22 illustre leur engagement Ă  le suivre, abandonnant leur vie antĂ©rieure. Luc 6.12-16 dĂ©crit comment JĂ©sus a choisi douze personnes parmi ses disciples, leur confĂ©rant le titre d’apĂŽtres.

Ces douze hommes ont formĂ© un groupe soudĂ© autour de JĂ©sus, bĂ©nĂ©ficiant d’enseignements approfondis et vivant des expĂ©riences extraordinaires, comme le montre Pierre marchant sur l’eau. AprĂšs la disparition de JĂ©sus, il est probable que la rĂ©daction de leurs souvenirs a fait l’objet de discussions et de dĂ©libĂ©rations, aboutissant Ă  une rĂ©daction concertĂ©e de leurs tĂ©moignages.

Matthieu 4.18–22 (S21)

18 Comme il marchait le long du lac de GalilĂ©e, il vit deux frĂšres, Simon, appelĂ© Pierre, et son frĂšre AndrĂ©, qui jetaient un filet dans le lac ; c’étaient en effet des pĂȘcheurs.
19 Il leur dit : « Suivez-moi et je ferai de vous des pĂȘcheurs d’hommes. »
20 AussitĂŽt, ils laissĂšrent les filets et le suivirent.
21 Il alla plus loin et vit deux autres frÚres, Jacques, fils de Zébédée, et son frÚre Jean, qui étaient dans une barque avec leur pÚre Zébédée et qui réparaient leurs filets. Il les appela,
22 et aussitĂŽt ils laissĂšrent la barque et leur pĂšre et le suivirent.

(Traduction Louis Segond S21)

Luc 6.12–16 (S21)

12 A cette époque-là, Jésus se retira sur la montagne pour prier ; il passa toute la nuit à prier Dieu.
13 Quand le jour fut levĂ©, il appela ses disciples et il en choisit parmi eux douze auxquels il donna le nom d’apĂŽtres :
14 Simon, qu’il appela aussi Pierre ; AndrĂ©, son frĂšre ; Jacques ; Jean ; Philippe ; BarthĂ©lĂ©my ;
15 Matthieu ; Thomas ; Jacques, fils d’AlphĂ©e ; Simon, appelĂ© le zĂ©lote ;
16 Jude, fils de Jacques ; et Judas l’Iscariot, celui qui devint un traütre.

(Traduction Louis Segond S21)

La tradition orale

Le Messie JĂ©sus, lorsqu’il s’adressait aux foules, n’avait pas besoin de notes. Son message, profondĂ©ment ancrĂ© dans son esprit, Ă©tait dĂ©livrĂ© avec une telle autoritĂ© que mĂȘme ses adversaires reconnaissaient la singularitĂ© de sa parole.

Jean 7.46–48 (S21)

46 Les gardes rĂ©pondirent : « Jamais personne n’a parlĂ© comme cet homme. »

47 Les pharisiens leur rĂ©pliquĂšrent : « Est-ce que vous aussi, vous vous ĂȘtes laissĂ© tromper ?

48 Y a-t-il quelqu’un parmi les chefs ou les pharisiens qui ait cru en lui ?

(Traduction Louis Segond S21)

Les disciples de JĂ©sus suivaient son exemple, partageant ce qu’ils avaient directement vu et entendu de leur MaĂźtre. Leurs prĂ©dications, souvent improvisĂ©es face Ă  des foules spontanĂ©ment rassemblĂ©es, Ă©taient marquĂ©es par une grande force, entraĂźnant des miracles, notamment lors de priĂšres pour les malades. AprĂšs la mort de JĂ©sus, la rĂ©surrection est devenue une source majeure d’encouragement et d’inspiration pour eux.

Leur prĂ©dication se centrait sur la personne de JĂ©sus, reconnue comme le Messie prophĂ©tisĂ©. Les disciples Ă©taient respectĂ©s pour leur tĂ©moignage direct des Ă©vĂ©nements qu’ils relataient.

La tradition orale apparaĂźt donc comme un moyen de transmission efficace. Un systĂšme mnĂ©motechnique, associant les enseignements et Ă©vĂ©nements de la vie de JĂ©sus aux fĂȘtes juives, facilitait la mĂ©morisation. Ces fĂȘtes, profondĂ©ment ancrĂ©es dans la culture, offraient un cadre naturel pour lier les Ă©vĂ©nements clĂ©s de la vie de JĂ©sus : la crucifixion pendant la PĂąque, le don du Saint-Esprit Ă  la PentecĂŽte, et la naissance de JĂ©sus associĂ©e traditionnellement Ă  la fĂȘte des Tabernacles.

Actes 5.12–14 (S21)

12 Beaucoup de signes miraculeux et de prodiges se faisaient au milieu du peuple par l’intermĂ©diaire des apĂŽtres. Ils se tenaient tous d’un commun accord au portique de Salomon.

13 Personne d’autre n’osait se joindre à eux, mais le peuple les tenait en grande estime.

14 Le nombre de ceux qui croyaient au Seigneur, hommes et femmes, augmentait de plus en plus.

(Traduction Louis Segond S21)

À cette Ă©poque, le groupe des 12 apĂŽtres jouait un rĂŽle central dans le dĂ©veloppement de la communautĂ© chrĂ©tienne naissante. Reconnus et respectĂ©s, ils jouissaient d’une grande autoritĂ© et Ă©taient crus lorsqu’ils annonçaient les Ɠuvres de Dieu.

Le remplacement de Judas l’Iscariote

Actes 1.21–26 (S21)

21 « Il faut donc choisir un homme parmi ceux qui nous ont accompagnĂ©s tout le temps oĂč le Seigneur JĂ©sus a vĂ©cu avec nous,

22 depuis le baptĂȘme de Jean jusqu’au jour oĂč il a Ă©tĂ© enlevĂ© du milieu de nous. Il nous sera associĂ© comme tĂ©moin de sa rĂ©surrection. »

23 Ils en présentÚrent deux : Joseph appelé Barsabbas, surnommé Justus, et Matthias.

24 Puis ils firent cette priĂšre : « Seigneur, toi qui connais le cƓur de tous, dĂ©signe lequel de ces deux hommes tu as choisi

25 pour prendre part Ă  ce ministĂšre et Ă  cette charge d’apĂŽtre que Judas a abandonnĂ©s pour aller Ă  la place qui est la sienne. »

26 Ils tirÚrent au sort et le sort tomba sur Matthias, qui fut associé aux onze apÎtres.

(Traduction Louis Segond S21)

Leur formation directe par le Messie JĂ©sus, les nombreuses soirĂ©es consacrĂ©es Ă  l’interprĂ©tation de ses paraboles, ainsi que leur existence commune face aux Ă©preuves, en particulier les confrontations avec les pharisiens, avaient forgĂ© entre eux des liens indĂ©fectibles.

AprĂšs la mort du Messie JĂ©sus, ils prirent conscience de leur devoir de prĂ©server l’intĂ©gritĂ© du tĂ©moignage de JĂ©sus. Il est difficile d’imaginer ces hommes agissant de maniĂšre isolĂ©e. Au contraire, ils choisirent de maintenir l’unitĂ© du groupe des 12 en intĂ©grant Matthias, un tĂ©moin des Ă©vĂ©nements depuis le baptĂȘme de Jean, dans leur cercle.

À cette Ă©poque, leur objectif Ă©tait de prĂ©server l’authenticitĂ© du tĂ©moignage apostolique, sans se douter de l’ampleur des changements Ă  venir dans la dynamique de leur mission.

Les évÚnements déclencheurs

Pour plus d’informations :
‱ Lire l’annexe ANN048 : La mort d’Etienne
‱ Lire l’annexe ANN057 : L’Église d’Antioche
‱ Lire l’annexe ANN049 : Les objectifs des Apîtres
‱ Lire l’annexe ANN036 : Le discours de l’Apître Pierre

Trois facteurs clĂ©s ont contribuĂ© Ă  un changement significatif dans la transmission du tĂ©moignage chrĂ©tien : l’arrivĂ©e massive de non-Juifs, la mort d’Étienne, et l’expansion gĂ©ographique de la foi Ă  la suite des persĂ©cutions.

L’ArrivĂ©e Massive des Non-Juifs

Au jour de la PentecĂŽte (22 mai 33), les ApĂŽtres ne pouvaient pas anticiper l’ampleur de l’adhĂ©sion des non-Juifs. Initialement, les nouveaux croyants Ă©taient majoritairement juifs, familiers avec le JudaĂŻsme et voyant le christianisme comme une extension de leur foi. La conversion des Gentils a dĂ©stabilisĂ© cet Ă©quilibre, rendant nĂ©cessaire une forme de transmission adaptĂ©e Ă  un public moins averti des traditions juives. (Annexe ANN036 : « Le discours de l’ApĂŽtre Pierre »)

La Mort d’Étienne

L’assassinat d’Étienne, dĂ©crit dans les Actes 7.59-60, a rĂ©vĂ©lĂ© aux apĂŽtres la prĂ©caritĂ© de leur situation. La perte de leur tĂ©moignage, en cas de disparition, reprĂ©senterait un revers majeur pour la propagation de leur nouvelle doctrine. Les arrestations successives n’ont fait qu’intensifier leur sentiment d’insĂ©curitĂ©. Cette situation soulĂšve une question cruciale : quelles seraient les consĂ©quences si eux, les apĂŽtres et tĂ©moins officiels, venaient Ă©galement Ă  disparaĂźtre ?

L’Expansion GĂ©ographique et les PersĂ©cutions

La persĂ©cution grandissante et la dispersion des chrĂ©tiens Actes 9.1-2 ont favorisĂ© la diffusion du message chrĂ©tien. La crĂ©ation d’une communautĂ© importante Ă  Antioche a montrĂ© aux ApĂŽtres que leur Ɠuvre dĂ©passait leur contrĂŽle direct et nĂ©cessitait une documentation Ă©crite.

L’Émergence de Textes Fantaisistes

Nous pouvons aussi ajouter ce point, face Ă  l’apparition de prĂ©dications et de textes divergents Marc 9.38, l’Ă©criture est devenue un outil essentiel pour prĂ©server l’authenticitĂ© de l’enseignement apostolique.

Conclusion

La combinaison de ces facteurs a incitĂ© les ApĂŽtres Ă  privilĂ©gier l’Ă©criture pour pĂ©renniser leur tĂ©moignage. La rĂ©pression politique et la diversitĂ© des croyants ont rendu cette transition inĂ©vitable. L’impulsion de l’Esprit Saint a Ă©tĂ© dĂ©terminante dans ce changement d’approche.

Le concile de Jérusalem

Le Concile de JĂ©rusalem, survenu en l’an 49, reprĂ©sente un tournant majeur dans l’histoire de l’Église primitive, marquĂ© par l’arrivĂ©e des paĂŻens et des conflits qui en dĂ©coulent. La distinction entre JudaĂŻsme et christianisme Ă©tait floue, et des dĂ©bats sur l’application des rites juifs aux paĂŻens Ă©mergeaient. AprĂšs leur premier voyage missionnaire en l’an 46, Paul et Barnabas, confrontĂ©s Ă  ces questions, ont cherchĂ© Ă  clarifier la situation.

L’autoritĂ© des ApĂŽtres et des demi-frĂšres de JĂ©sus Ă©tait reconnue. Ils partirent d’Antioche, oĂč une importante communautĂ© chrĂ©tienne s’Ă©tait Ă©tablie, pour se rendre Ă  JĂ©rusalem. Ce concile, le premier grand dĂ©bat officiel de la nouvelle Église, est dĂ©taillĂ© dans le 15Ăšme chapitre des Actes des ApĂŽtres. Contrairement Ă  la nomination des diacres quelques annĂ©es auparavant, le Concile de JĂ©rusalem abordait des problĂšmes doctrinaux fondamentaux.

Actes 15.30–31 (S21)

30 Ils prirent donc congĂ© de l’Église et allĂšrent Ă  Antioche, oĂč ils rĂ©unirent l’assemblĂ©e et lui remirent la lettre.

31 On en fit la lecture et tous se rĂ©jouirent de l’encouragement qu’elle leur apportait.

(Traduction Louis Segond S21)

Les tensions naissantes, souvent en lien avec le JudaĂŻsme, soulignaient la nĂ©cessitĂ© d’une ligne directrice claire. Beaucoup de Juifs acceptaient l’enseignement de JĂ©sus tout en observant la loi juive. La question Ă©tait de savoir si de telles pratiques devaient ĂȘtre imposĂ©es aux convertis non juifs. Jacques, le demi-frĂšre de JĂ©sus et responsable de l’Église de JĂ©rusalem, a jouĂ© un rĂŽle clĂ© dans la rĂ©daction d’une lettre adressĂ©e Ă  l’Église d’Antioche pour clarifier ces points.

Nous souhaitons souligner deux points essentiels. Le premier concerne les dissensions au sein de l’Église et l’autoritĂ© centrale de l’Église de JĂ©rusalem, ainsi que de ses dirigeants. Il leur incombe de proposer une solution qui, visiblement, est attendue et qui sera respectĂ©e.

Le second point concerne la lettre Ă©crite Ă  la suite des dĂ©libĂ©rations. Cette lettre a Ă©tĂ© envoyĂ©e Ă  Antioche avec Barsabas et Silas, qui Ă©taient accompagnĂ©s par Paul et Barnabas. Cette dĂ©marche montre que les responsables de l’Église de JĂ©rusalem ont soigneusement examinĂ© le problĂšme et ont consignĂ© par Ă©crit leurs conclusions.

Comment, alors, ne pas envisager de façon similaire la mise par Ă©crit du tĂ©moignage des apĂŽtres, cette ‘Bonne Nouvelle’, certifiĂ©e personnellement par les 12 apĂŽtres ? Il serait illogique de prĂ©parer une lettre pour communiquer les dĂ©cisions prises lors d’un diffĂ©rend liĂ© au judaĂŻsme, tout en nĂ©gligeant de fixer par Ă©crit un tĂ©moignage d’une importance cruciale pour la foi des convertis.

Nous estimons donc que les Évangiles selon Matthieu et Marc Ă©taient dĂ©jĂ  rĂ©digĂ©s avant ce concile de l’an 49. Cependant, il faut garder Ă  l’esprit que nous ne disposons plus d’aucun document original certifiant leur Ă©criture au premier siĂšcle.

Le passage Ă  l’écriture avant l’an 46

L’Ă©tude des liens Ă©troits unissant le groupe des douze apĂŽtres rĂ©vĂšle des Ă©lĂ©ments clĂ©s pour comprendre la rĂ©daction commune des Évangiles. Leur amitiĂ©, fraternitĂ©, et dĂ©vouement Ă  la vĂ©ritĂ© Ă©clairent sur leur collaboration dans ce projet. Ces hommes, reconnus pour leur proximitĂ© exceptionnelle avec le Messie JĂ©sus, ont partagĂ© des expĂ©riences uniques.

Nous avons Ă©galement identifiĂ© les Ă©vĂ©nements qui, selon nous, ont motivĂ© leur dĂ©cision de consigner par Ă©crit leur tĂ©moignage. Parmi les apĂŽtres, Matthieu se distingue comme ayant les capacitĂ©s requises pour entreprendre cette rĂ©daction. Nous avançons dans l’annexe ANN049 : « Les objectifs des apĂŽtres », que l’Évangile de Matthieu aurait Ă©tĂ© Ă©crit en premier, avant l’an 46, suivi de prĂšs par celui de Marc. Cette hypothĂšse s’oppose aux thĂ©ories d’historiens suggĂ©rant des rĂ©dactions plus tardives.

Historiquement, aucune découverte archéologique ne confirme une rédaction antérieure à 46. Notre théorie repose sur le pragmatisme et le bon sens des apÎtres, face aux réalités historiques de leur époque.

Un Ă©lĂ©ment supplĂ©mentaire vient appuyer cette hypothĂšse : la discrĂ©tion des auteurs des Évangiles concernant les noms et lieux spĂ©cifiques. Par exemple, la maison de Marie, la mĂšre de Jean surnommĂ© Marc, ou le lieu de la CĂšne restent anonymes. Cette prudence pourrait s’expliquer par la protection des personnes encore en vie Ă  l’Ă©poque de la rĂ©daction, susceptibles d’ĂȘtre persĂ©cutĂ©es. Dans l’Évangile de Jean, rĂ©digĂ© plus tardivement, cette prĂ©caution n’est plus nĂ©cessaire, les personnes Ă©voquĂ©es Ă©tant probablement dĂ©jĂ  dĂ©cĂ©dĂ©es.

Les autres Évangiles

Pour plus d’informations :
‱ Lire l’annexe ANN008 : L’Évangile de Matthieu
‱ Lire l’annexe ANN015 : L’Évangile de Marc
‱ Lire l’annexe ANN001 : l’Évangile de Luc
‱ Lire l’annexe ANN002 : L’Évangile de Jean
‱ Lire l’annexe ANN049 : Les objectifs des Apîtres

Luc 1.1–4 (S21)

Plusieurs ont entrepris de composer un récit des évÚnements qui se sont accomplis parmi nous,

2 d’aprĂšs ce que nous ont transmis ceux qui ont Ă©tĂ© des tĂ©moins oculaires dĂšs le commencement et qui sont devenus des serviteurs de la parole.

3 Il m’a donc paru bon Ă  moi aussi, qui me suis soigneusement informĂ© sur toutes ces choses dĂšs l’origine, de te les exposer par Ă©crit d’une maniĂšre suivie, excellent ThĂ©ophile,

4 afin que tu reconnaisses la certitude des enseignements que tu as reçus.

(Traduction Louis Segond S21)

Lorsque Luc entame la rĂ©daction de son Évangile, il est conscient que d’autres ont dĂ©jĂ  entrepris une dĂ©marche similaire. Il souligne que ces auteurs anonymes, tout comme lui, se sont appuyĂ©s sur le tĂ©moignage des apĂŽtres.

Bien que cette source d’information puisse ĂȘtre de nature orale, il semble plus probable que Luc fait rĂ©fĂ©rence aux Ă©crits de Matthieu et de Marc.

Autrement dit, certains Ă©crivains, s’inspirant des textes de Matthieu et de Marc ainsi que de leurs propres souvenirs en compagnie des apĂŽtres, se sont lancĂ©s dans la rĂ©daction d’une histoire de JĂ©sus. Selon Luc, cela a conduit Ă  une prolifĂ©ration de rĂ©cits sur la vie de JĂ©sus.

Luc n’est donc pas le seul Ă  avoir rĂ©digĂ© un rĂ©cit sur le Messie JĂ©sus. Il convient de rappeler qu’Ă  cette Ă©poque, l’Ă©criture Ă©tait principalement pratiquĂ©e par une minoritĂ© de personnes cultivĂ©es, ce qui leur confĂ©rait une influence certaine auprĂšs du peuple.

La principale prĂ©occupation devenait alors la fiabilitĂ© des informations transmises. Pour cette raison, il Ă©tait crucial d’ĂȘtre reconnu dans la communautĂ© chrĂ©tienne pour confĂ©rer une certaine officialitĂ© Ă  son texte.

La priorité de Marc

La ‘prioritĂ© de Marc’ est une hypothĂšse bien Ă©tablie parmi les spĂ©cialistes des Évangiles en Ă©tudes bibliques. ProposĂ©e au dĂ©but du 19e siĂšcle, cette thĂ©orie suggĂšre que l’Évangile selon Marc a Ă©tĂ© le premier des quatre Évangiles du Nouveau Testament Ă  ĂȘtre rĂ©digĂ©. Cette idĂ©e remet en question l’ordre chronologique traditionnellement admis, qui place Matthieu en premier, suivi de Marc, Luc, et Jean. Nous allons examiner briĂšvement cinq arguments clĂ©s qui soutiennent cette thĂ©orie, tout en apportant nos observations pour chaque point.

SimplicitĂ© et briĂšvetĂ© de Marc : Marc est le plus court et semble moins Ă©laborĂ© que Matthieu et Luc. Cette simplicitĂ© suggĂšre que Marc pourrait ĂȘtre la source originale.
Notre observation : Cette briĂšvetĂ© pourrait rĂ©sulter d’une simplification du texte de Matthieu, destinĂ©e Ă  un public non-juif.

Structure narrative : Matthieu et Luc suivent largement l’ordre des Ă©vĂ©nements de Marc, tout en y ajoutant leur propre contenu.
Notre observation : Il est également possible que Marc et Luc aient adapté la structure de Matthieu, modifiant le contenu pour leurs propres objectifs.

Détails et langue : Les choix de langue et les détails bruts de Marc sont souvent édulcorés dans Matthieu et Luc.
Notre observation : Les compétences linguistiques érudites de Matthieu et Luc se manifestent dans leurs récits, tandis que le récit de Marc reflÚte une approche plus simple, adaptée à un public moins familier avec les coutumes juives.

ThĂ©orie des deux sources : SuggĂšre que Matthieu et Luc ont utilisĂ© Marc et une source hypothĂ©tique ‘Q’ pour leur rĂ©daction.
Notre observation : Nous envisageons plutĂŽt une liste commune de pĂ©ricopes Ă©tablie par les apĂŽtres, avec Matthieu en tant que principal rĂ©dacteur. Pierre aurait ensuite simplifiĂ© le texte de Matthieu avec l’aide de Marc.

Analyses littéraires et textuelles : Matthieu et Luc reprennent souvent textuellement des portions de Marc.
Notre observation : Luc, Ă©crit bien aprĂšs Matthieu et Marc, doit ĂȘtre analysĂ© sĂ©parĂ©ment. L’Ă©troite liaison entre Matthieu et Marc suggĂšre que Marc est une version simplifiĂ©e de Matthieu.

En conclusion, bien que la prioritĂ© de Marc soit largement dĂ©battue, elle n’est pas universellement acceptĂ©e. Notre analyse suggĂšre que la prioritĂ© de Matthieu reste une option viable, en accord avec la dynamique du groupe des apĂŽtres.

Date de rĂ©daction des Évangiles

La datation des Évangiles de Matthieu et Marc suscite un dĂ©bat acadĂ©mique continu. À la suite de la PentecĂŽte du 24 mai 33, marquĂ©e par le discours inspirĂ© de Pierre (voir l’annexe ANN036 : Le discours de l’apĂŽtre Pierre), les ApĂŽtres ont dĂ» gĂ©rer une communautĂ© chrĂ©tienne grandissante. Face Ă  cette situation, ils ont pris la dĂ©cision de consigner par Ă©crit leur tĂ©moignage.

Nous postulons que les Évangiles de Matthieu et de Marc auraient Ă©tĂ© rĂ©digĂ©s avant le Concile de JĂ©rusalem en l’an 49. Matthieu aurait Ă©tĂ© rĂ©digĂ© en premier, suivi par Marc, dont l’Évangile serait une adaptation du rĂ©cit de Matthieu pour un public non-juif, en particulier aprĂšs le retour prĂ©maturĂ© de Marc en l’an 46.

Les experts avancent des dates de rĂ©daction entre 50 et 70, voire plus tard. Sans preuves formelles ou originaux, nous disposons de plus de 5 000 copies grecques des premiers siĂšcles. La multiplication des copies a introduit le risque de divergences et de faux Ă©vangiles. Les traductions grecques des Évangiles de Matthieu et de Marc tĂ©moignent de la demande des nouveaux convertis Ă  travers le monde connu de l’Ă©poque.

Des experts suggĂšrent une rĂ©daction, ou traduction, en grec Ă  Antioche pour Matthieu et Ă  Rome pour Marc, ce qui n’est pas incompatible avec notre hypothĂšse d’une rĂ©daction initiale en aramĂ©en pour Matthieu et en grec pour Marc Ă  JĂ©rusalem.

La datation des Évangiles reste un sujet complexe, souvent rĂ©servĂ© aux experts. Nous considĂ©rons qu’une rĂ©daction prĂ©coce des Évangiles, Ă  une Ă©poque oĂč des tĂ©moins oculaires Ă©taient encore vivants pour confirmer les rĂ©cits, est essentielle pour attester de leur vĂ©racitĂ©. Cette rĂ©daction rapide aurait contribuĂ© Ă  l’adhĂ©sion massive des premiers chrĂ©tiens 1 Corinthiens 15.6.

Les prophĂ©ties concernant la destruction du temple, mentionnĂ©es dans Matthieu 24.1-44 et Marc 13.1-37, ont conduit certains chercheurs Ă  dater ces Ă©crits aprĂšs l’Ă©vĂ©nement de l’an 70. Cependant, cela soulĂšve la question de la nature prophĂ©tique des Ă©critures, comme celles de Daniel et d’Esdras, qui annoncent des Ă©vĂ©nements futurs. Cette interprĂ©tation dĂ©pend de l’acceptation de la prophĂ©tie comme un Ă©lĂ©ment lĂ©gitime de la narration biblique.

L’Anonymat des textes

L’objectif initial des apĂŽtres Ă©tait de prĂ©server leur tĂ©moignage pour les gĂ©nĂ©rations futures Ă  travers un Ă©crit, connu sous le nom d’Évangiles des ApĂŽtres. Pierre a rapidement compris la nĂ©cessitĂ© d’adapter ce texte en fonction du public cible. Ainsi, au lieu d’un seul texte, deux versions ont Ă©tĂ© Ă©laborĂ©es.

À l’Ă©poque oĂč ces rĂ©cits Ă©taient diffusĂ©s, les lecteurs et auditeurs connaissaient gĂ©nĂ©ralement leurs auteurs, rendant inutile de les nommer explicitement. De plus, pourquoi nommer spĂ©cifiquement Matthieu alors que l’Ɠuvre Ă©tait le fruit d’un effort collectif ? Cette collaboration est l’une des raisons de l’anonymat initial des textes Ă©vangĂ©liques. Ce n’est qu’au IIe siĂšcle que les Évangiles ont Ă©tĂ© officiellement attribuĂ©s Ă  leurs auteurs respectifs.

À cette Ă©poque, les communautĂ©s chrĂ©tiennes disposaient d’un rĂ©cit destinĂ© aux Juifs, l’Évangile selon Matthieu, et d’un autre, celui selon Marc, orientĂ© vers les non-Juifs. Avec l’ajout des rĂ©cits de Luc et de Jean, il est devenu nĂ©cessaire d’identifier plus formellement les auteurs pour les chrĂ©tiens du IIe siĂšcle. L’identification de l’Ă©crivain Ă©tait considĂ©rĂ©e comme celle de l’auteur.

Vers la fin du IIe siĂšcle, les PĂšres de l’Église, tels que ClĂ©ment d’Alexandrie, Tertullien et IrĂ©nĂ©e de Lyon, ont dĂ» nommer et distinguer ces textes Ă©vangĂ©liques des autres Ă©crits considĂ©rĂ©s comme non authentiques ou fantaisistes. Ils ont ainsi Ă©tabli le canon biblique tel que nous le connaissons aujourd’hui. Cette sĂ©lection des textes canoniques a probablement Ă©tĂ© formalisĂ©e Ă  Rome, comme le suggĂšre le Canon de Muratori.

Les textes non inclus dans ce canon, jugés non inspirés et donc non fiables, ont été classés comme apocryphes.

La réalité des miracles

Les Évangiles relatent divers Ă©vĂ©nements qui relĂšvent du miracle, comme la venue des bergers et l’apparition des anges aprĂšs la naissance de JĂ©sus. Ces rĂ©cits soulĂšvent la question de leur nature : s’agit-il de faits historiques ou de manifestations thĂ©ologiques accessibles uniquement par la foi ?

Il est indĂ©niable que certains Ă©lĂ©ments des Évangiles, comme la naissance virginale de JĂ©sus, l’Ă©toile de BethlĂ©em, ou les guĂ©risons opĂ©rĂ©es par JĂ©sus, dĂ©fient notre comprĂ©hension rationnelle. Cependant, les rĂ©duire Ă  de simples symboles en raison de leur caractĂšre extraordinaire serait ignorer leur potentiel de vĂ©ritĂ©.

Ces rĂ©cits, bien que mettant en dĂ©fi nos lois naturelles, peuvent ĂȘtre interprĂ©tĂ©s comme des moments oĂč des rĂšgles divines transcendent notre rĂ©alitĂ© connue. Ainsi, accepter ces Ă©vĂ©nements comme des rĂ©alitĂ©s historiques nĂ©cessite une ouverture Ă  la dimension transcendante de l’existence.

D’autre part, il est crucial de reconnaĂźtre que la dĂ©marche de rationalisation excessive de ces Ă©vĂ©nements peut mener Ă  un Ă©loignement de l’essence des Évangiles. Des explications trop Ă©rudites ou scientifiques peuvent conduire Ă  des interprĂ©tations erronĂ©es, semant le doute et sapant la foi de certains.

Les Évangiles, lorsqu’ils sont abordĂ©s uniquement sous un angle critique et sceptique, risquent d’ĂȘtre perçus comme de simples lĂ©gendes ou tromperies. Pour apprĂ©hender pleinement leur message, une reconnaissance de la rĂ©alitĂ© de Dieu et de son action dans le monde est fondamentale. Sans cette acceptation, les miracles Ă©voquĂ©s dans les Évangiles peuvent sembler dĂ©nuĂ©s de sens ou d’authenticitĂ©.

Conclusion

Dans notre recherche, nous avons examinĂ© la maniĂšre dont les ApĂŽtres, en se basant sur le pragmatisme, ont modifiĂ© leur mĂ©thode pour satisfaire les diffĂ©rents besoins de la communautĂ© chrĂ©tienne Ă©mergente. Il convient de noter que nos suggestions sont purement hypothĂ©tiques, puisqu’il n’existe actuellement aucune preuve concrĂšte pour Ă©tayer ou rĂ©futer cette thĂ©orie. De la mĂȘme façon, les autres thĂ©ories concernant ce sujet reposent aussi sur des suppositions.

Nous soutenons que notre position, qui envisage une Ă©volution naturelle et logique de la dĂ©marche des ApĂŽtres, est crĂ©dible et plausible. Initialement, le message chrĂ©tien, principalement destinĂ© Ă  un public juif, reposait sur le tĂ©moignage direct des ApĂŽtres. Cependant, face Ă  l’expansion rapide du mouvement et aux divers tĂ©moignages de guĂ©risons, ainsi qu’aux interprĂ©tations variĂ©es, les ApĂŽtres se sont trouvĂ©s dans la nĂ©cessitĂ© de formaliser l’annonce de la Bonne Nouvelle par Ă©crit.

Les convertis non juifs rencontraient des difficultĂ©s Ă  intĂ©grer les traditions juives, exacerbant la nĂ©cessitĂ© de distinguer clairement le JudaĂŻsme de l’Évangile. Les ApĂŽtres ont donc dĂ» aborder et rĂ©soudre ces problĂ©matiques lors du Concile de JĂ©rusalem en l’an 49 (Actes 15).

Nous postulons que les Évangiles ont Ă©tĂ© rĂ©digĂ©s rapidement, avant l’an 49 et probablement peu de temps aprĂšs la premiĂšre PentecĂŽte du 24 mai 33. Ces textes originels se sont perdus avec le temps, et les versions actuelles proviennent de copies ultĂ©rieures.

Cette hypothĂšse semble cohĂ©rente avec les Ă©vĂ©nements historiques du dĂ©but de l’Église chrĂ©tienne. Comme l’a suggĂ©rĂ© un docteur de la loi du temps de JĂ©sus, citĂ© dans Actes 5.38-39, si cette Ɠuvre provenait de Dieu, elle persisterait malgrĂ© les obstacles.

Actes 1.8 indique Ă©galement que les ApĂŽtres seront des tĂ©moins « à JĂ©rusalem, dans toute la JudĂ©e, dans la Samarie et jusqu’aux extrĂ©mitĂ©s de la terre ». Cette directive semble se reflĂ©ter dans la rĂ©daction des Évangiles : Matthieu pour JĂ©rusalem et la JudĂ©e, Marc pour la Samarie et les rĂ©gions Ă©trangĂšres, Luc pour les « extrĂ©mitĂ©s de la terre » et Jean avec une portĂ©e universelle.